2 Neurones & 1 Camera

Olivier Thereaux

Village global

photo: escaliers

Tout a commencé avec les manufactures, l'automobile les avions quelques guerres aussi et paf! sans crier gare, voilà que la culture se retrouve, un peu malgré elle, élevée au rang de commodité, presqu'universelle, et en deux temps trois mouvements, bien de consommation, consommation de masse. Peu à plaindre, elle s'est plutôt bien adaptée au capitalisme, la culture, et il n'est pas si choquant de penser que c'est elle, autant peut-être que l'hygiène et la médecine, qui aura le plus profité du "progrès". Jusqu'à semble-t-il s'y sentir un petit peu à l'étroit.

En ce sens, l'actualité récurrente des maisons de disques et des studios pleurnichant devant leurs malheureux bilans financiers ne sont pas juste le signe d'un avènement d'une "culture numérique"; c'est peut-être aussi que la culture s'accommode assez mal de certains des mécanismes qu'on aura voulu lui imposer. Tant que l'industrie des médias se contentait de produire de la variété, tout se passait à merveille, mais qu'elle s'essaie à l'économie d'échelle et tente le gavage de pop, et la culture apparemment s'exaspère. Et change de crèmerie.

J'ignore qui gagnera tel ou tel procès entre l'industrie médiatique et les nouveaux réseaux. Cela n'a que peu d'importance. C'est une partie pour l'honneur, un dernier combat. Un coup dans l'eau. Le vrai combat n'aura pas lieu. Goliath gardera sans doute le divertissement, trophée de pacotille, David, lui, a déjà empoché la culture.

Car oublions un instant les coûteuses - et rentables - grosses machines usinées du divertissement de masse, et l'on se souvient que la vraie richesse d'Internet, c'est de permettre à tout et n'importe quoi de cohabiter sans se marcher sur les pieds. Pas besoin de subvention départementale pour payer les murs d'une exposition de peinture du dimanche sur Internet; stocker et admirer les croûtes ne coûte rien, et ce rien même est en chute libre.

Les échauffourées entre les réseaux et les médias classiques conduiront, sans doute, ces derniers à une encore plus grande concentration sur une production tellement coûteuse qu'elle ne pourrait se faire ailleurs, tuant, faute de place, le mythe déjà bien fragile que la commercialisation de l'art fait vivre. Ce fut peut-être vrai pendant un temps, pour quelques chanceux, mais pour tous les autres, le leurre est en train d'imploser et l'on se souvient que depuis que l'art est art, c'est de mécénat et d'artisanat qu'il s'agit.

Retour à la case départ, alors, pour la culture, après son incartade dans les temps modernes? Pas pour les peintres du dimanche et les poètes de comptoir; ce sont là nos gagnants, affranchis de la salle communale et du bar des sports, en route vers les nouveaux horizons du blog et de la galerie Web. Vu sous cette angle, le concept de "village global" paraît tout de suite moins inepte...

olivier, samedi 20 novembre 2004, 2:27

Avant/Après

Et pour les tatouages?

A l'exception tout juste notable d'excite "world", il n'y avait jusqu'ici pas foule de ressources folichonnes pour l'aide à l'apprentissage du japonais sur le Web. Puis Julien Quint créa A亜アあ (prononcer ah-ah-ah-ah), Un dictionnaire des kanji pratique, animé, exhaustif, interactif… Et accessoirement une jolie utilisation de la technologie SVG[*]. Magnifique. Bravo.

À suivre


Question

En echo à mon précédent billet sur les évolutions de la distribution culturelle, un éloquent essai sur le copyright en général et l'industrie musicale en particulier, signé Kleptones. Et en musique, s'il vous plaît.

À suivre